Joann Sfar, dessinateur : “Le pire ennemi de la cause palestinienne, c’est l’antisémitisme”

Joann Sfar, dessinateur : “Le pire ennemi de la cause palestinienne, c’est l’antisémitisme”

[Musique]
bonjour Joann spour et bienvenue sur ce
plateau merci d’avoir accepté notre
invitation vous êtes dessinateur on vous
doit entre autres dessinateurs on vous
doit plusieurs séries à succès notamment
le chat du Rabin ou petit vampire et
vous publiez ces jours-ci nous vivrons
enquête s sur l’avenir des Juifs qui est
publié aux arènes 450 pages dessinées en
moins de 3 mois un journal intime
chronologique entamé le 7 octobre
dernier et dans le Vous faites part de
vos questions de vos angoisses de vos
colères vous récoltez la parole ici en
France et en Israël de plusieurs
dizaines de personnes qui s’interrogent
comme vous comme nous en réalité sur les
conséquences du massacre et sur ce qu’il
se passe au ProcheOrient depuis le début
du mois d’octobre dernier on va regarder
cette couverture on va s’y arrêter si
vous le voulez bien c’est vous là sur la
couverture dans cette manifestation qui
a quelque chose je me suis dit en la
voyant de sans paix disparu je crois que
vous l’aimiez beaucoup sans PAI et il y
a une seule banderole et c’est pour ça
que ça m’a fait penser à s pai il y a
quelque chose sur la banderole est-ce
que vous pouvez nous expliquer ce que
c’est oui il y a ce ce signe juif rail
qui veut dire la Vie l’aspiration juive
à survivre que ce soit en Europe ou au
Proche-Orient et ce dessin c’est une
copie figurez-vous du d’une affiche
yidich marxiste des années 20 où le
Bount les étudiants juifs et les les
syndicalistes Juifs voulaient être une
voix en Europe et j’ai c’est pas ma voix
dans ce livre c’est surtout la voix de
tous les Juifs que je connais en France
France puis ensuite en Israël sur leurs
doutes leurs incertitudes leurs peur et
j’ai essayé de faire un matériau pour
les journalistes et pour les historiens
je suis ni Journaliste ni historien mais
j’ai essayé de rendre compte de de ces 4
mois de de de folie et et de voir ce qui
se passe dans une tête juive en ce
moment c’est pas votre voix mais dans le
nous il y a vous oui sans doute oui sans
doute parce que plusieurs mythes se sont
écroulés le le premier c’est le le
bouclier laïque et républicain qui qui
protège toutes les minorités la réalité
c’est qu’il y a eu 1000 % d’augmentation
d’ antijuive en France après le 7
octobre avant même la la riposte
israélienne et tout le monde s’en fout
parce qu’on fait on est que 0,6% de la
population mais les Juifs vivent un
enfer en France et je pensais pas vivre
ça de de mon vivant et ensuite en Israël
parce que au-delà de la guerre au-delà
des des dangers physiques il y a un
combat en Israël sur qu’est-ce qu’on
fait là quelle est notre identité
qu’est-ce que c’est le pacte social en
Israël et j’ai essayé de faire parler
mes mes interlocuteurs au moment où ils
me disent aura pas le temps de nous
écouter et là je prends du temps et là
je les emmène au lieu d’incohérence au
lieu où en trois phrases ils me disent
une chose est l’inverse et j’aime mieux
les individus quand ils sont perdus que
quand ils ont des certitudes on va y
revenir bien sûr pour revenir sur ce ce
rail qui est sur la couverture de la du
du roman graphique le 7 octobre dernier
c’était précisément sur ces deux lettres
que vous étiez en train de travailler
quand vous avez appris ce qui se passait
parce qu’on fêtait mon anniversaire il y
avait une une centaine d’invités qui
arrivaient à la maison maison on n’
jamais eu autant de Juifs et d’Arabes
dans la même maison et on a passé toute
la journée à se demander si on annulait
la fête ou pas euh moi je suis français
toute ma famille paternelle est
israélienne je suis un juif moitié
maghrébain moitié ukrainien et toutes
ces influences se mélangent pour dire
oui tout à la fois mon chagrin et à la
fois toutes les voix que j’ai envie de
faire parler parce que les voix de la
paix existent toujours parce que le le
miracle du Maghreb où on s’est on s’est
connu pendant longtemps fait de la
France une plateforme formidable pour
pour changer les narrativs pour inventer
l’avenir et j’aimerais qu’on aille vers
ça j’aimerais qu’on ait le courage de se
réinventer et ce rail que vous dessiniez
ce jour-là c’était pour un un bijou que
vos copains vous ont offert pour votre
anniversaire et c’est c’est ça voilà
c’est ça et c’est pas un secret je suis
allé aux éditions des Arennes parce que
c’est un grand éditeur de sciences
humaines et le livre a été entouré par
des historiens et des journalistes donc
je dis pas trop de bêtises mais le livre
devait être ailleurs et un autre éditeur
m’a dit si tu mets un sigle hébraïque en
couverture euh on en on en imprimera
très peu et les libraires vont refuser
cet ouvrage parce que c’est cl alors ça
ça m’a préoccupé parce que raï c’est pas
israélien c’est pas sioniste c’est même
pas religieux c’est un gris grriis donc
si un caractère hébraïque en couverture
c’est un problème ça veut dire qu’on a
un souci avec les voix juives
aujourd’hui il y a des libraires
aujourd’hui qui n’ont pas voulu mettre
votre livre en qui n’ont pas voulu pas
pu penser que c’était pas possible de le
mettre dans les vitrines non pas du tout
non pas du tout l’accueil est
extraordinaire on a on a déjà lancé
plusieurs réimpression c’est c’est un
livre de paix c’est un livre pour faire
parler toutes sortes de voix y compris
des voix musulmanes j’ai pas perdu un un
seul ami musulman depuis le 7 octobre je
je je crois que si on fait l’effort
d’ouvrir le livre c’est un livre qui
demande qu’une chose c’est qu’on se
réinvente vous dites que vous n’avez
plus pu faire autre chose à partir du 7
octobre il vous fallait il vous fallait
ne faire plus que ça moi je suis
dessinateur d’aprèsnature je suis
portraitiste je suis un amoureux de de
Tintin et de coraltaise j’ai arrêté tous
mes autres projets mais je savais pas
que nous vivrons c’était un livre au
début je faisais des dessins je les
mettais sur Instagram pour donner une
voix au aux Juifs de France et ensuite
quand je suis parti en Israël là je me
suis dit allez on va faire comme si
j’étais Tintin ou Joseph Kessel je vais
aller voir comment c’est j’y vais
souvent parce que je produis de la
télévision en Israël et toute ma famille
est là-bas mais je voulais aller voir
dans ce moment précis ce qui se passait
et et je le regrette pas parce que je
suis revenu je dirais pas avec l’espoir
mais je suis revenu avec de l’énergie
parce que les voix de la paix sont
toujours là il y a des initiatives qui
ont l’air ridicule en ce moment mais le
théâtre juif arabe a Jafa ISAM Souleiman
qui organise des des des dîners des
déjeunés c’est un comédien palestinien
avec tout le monde ils savent très bien
qu’en ce moment il sert à rien mais ils
arrêtent pas les les manifestations pour
la paix qui ont lieu là-bas qui sont
beaucoup plus courageuses que quand
elles ont lieu ici parce que là-bas il y
a vraiment des coups à prendre le c’est
ces appeler du contingent israélien qui
qui qui sont dans la guerre et qu’s ont
dès qu’ils ont de jours de libre vont
manifester contre le gouvernement donc
il y a une population qui est qui est
dans un vrai désarrois je pense aussi au
au aux Arabes israéliens ou aux
Palestiniens d’Israël qui sont déchirés
à tous les niveaux parce que quand elle
la vive et bombardé ils vont dans les
mêmes abris que les autres et et en même
temps ils ont une sollicitude qu’on peut
tout à fait comprendre avec leurs frères
de Gaza tout ça et et ce qui est
terrible c’est que dès que je dis c’est
complexe je me fais insulter on peut
être révolté on peut être scandalisé par
les morts mais c’est pas une raison pour
éteindre le cerveau donc aimer cette
région et vouloir la paix c’est étudier
l’histoire de cette région et j’essaie
aussi dans nous vivrons de faire parler
l’imaginaire et les souvenirs de gens
que je connais qui me raconaient leur
proche orient et ça me paraît important
ouais parce que vous dites qu’après le
le 7 octobre vous vous êtes senti
tellement seul que vous avez dû invoquer
parmi les gens qui n’étaient plus là
votre père votre grand-père notamment
oui parce que la manière dont il me
racontait cette région m’intéressait mon
père était un juif algérien favorable à
l’indépendance qui était proche de fer à
Tabas et il était en même temps très
sioniste parce que selon lui c’était des
identités modernes qui étaient nées sur
les les décomes des grands empires et
selon lui il avait une phrase il avait
une phrase formidable il disait on est
juif alors on est pour Israël si on
était arabe on serait pour la Palestine
c’était sa manière de dire que tout le
monde avait raison qu’il faut être
capable de reconnaître la tragédie de
l’Autre c’est-à-dire ce qu’on subit les
Palestiniens en 48 le million de Juifs
qui ont été foutus dehors du monde arabe
entre 1920 et 19 960 et le découpage à
la serpe de cette région par les Anglais
et par les nations- Unies bon
aujourd’hui il y a des populations
malheureuses qui rêvent d’avenir quand
on parle à des individus là-bas leurs
espoirs c’est les mêmes que les nôtres
c’est survivre avoir un pays avoir des
frontières avoir une espèce d’économie
possible dans la région dès qu’on voit
les individus on va s’en sortir quand on
est dans des généralités c’est la guerre
éternelle qu’on prône de qui vous auriez
bien aimé entendre la voix après le 7
octobre qui vous a manqué il y a eu un
silence terrible je vais vous dire juste
un évén
j’étais j’étais en Israël pour le pour
le reportage et on m’appelle parce que
on le sait pas mais il y a 2 millions et
demi de musulmans en Israël parmi les
victimes et les otages du 7 octobre il y
a beaucoup de bédouins il y a beaucoup
de musulmans et les familles de ces
Bédouins les familles des otages
musulmanes étaient à Paris et vous les
rencontrez des musulmans en France à ma
connaissance quasiment personne n’a
voulu les rencontrer c’est il y a il y a
vraiment une il y a un refus de l’humain
dans dans ces silences là et et le
problème c’est que ces silences créent
des crispations et créent des
polarisations qui n pas lieu d’être
parce que tous les gens que je connais
quel que soit leur bord en France sont
contre la guerre à Gaza sont contre les
otages je connais pas de gens qui sont
fans du Hamas ou fans de netaniaou les
les les gens souhaitent survivre mais
par des attitudes cette immense majorité
silencieuse qui veut le bien de tout le
monde et vous auriez bien aimé qu’elle
dis elle a été trop silencieuse elle a
été trop silencieuse vous auez voulu
voir une grande manifestation après le
massacre 12
morts le 9 octobre on était 10000
personnes à marcher vers Trocadero je
crois qu’on était que des Juifs il y
avait quelques Iran et sur notre chemin
les les les fenêtres se fermaient sur
les balcons du Trocadero et il y avait
une vieille dame Juve à côté de moi elle
me disait mais pourquoi il sortent pas
sur les balcons pour nous saluer et je
me suis senti très seul à ce moment-là
et et c’est tout mais ça ça fait c’est
pas c’est pas nouveau moi je me je me
passionne pour le Proche Orient depuis
les années 1990 quand je suis arrivé à
Paris je participais à des rencontres
israëlo-palestiniennne à Paris avec des
étudiants français et à l’époque quel
que soit son camp les gens parlaient
donc on s’éduquait les uns et les autres
sur le narratif de de de chaque famille
et je pense que ça nous rendait d’abord
ça nous aidait ensuite ça nous rendait
moins bête et ça nous rapprochait de la
réalité de la région mais comment vous
expliquez est-ce que est-ce que 8 mois
après vous vous vous arrivez à vous
expliquer pourquoi il n’y a pas eu un un
grand mouvement euh
populaire c’est c’est pas c’est pas
c’est pas à moi de le faire je je je
crois qu’on a on a loupé une marche sur
le le le lien de notre jeunesse avec le
proche orient je crois que il y a eu euh
depuis une Vinge d’années une espèce de
de diudonisation des esprits moi j’ai
grandi dans un monde où par parmi les
militants palestiniens proalestiniens il
y avait 20 % de juifs ça n’a plus été
possible dès que des gens comme Dieu
donné se sont emparés de cette cause et
l’on nourrit de sous-exte antijuif moi
je fais partie des gens qui répètent que
le pire ennemi de la cause palestinienne
c’est l’antisémitisme et et je suis
persuadé de la bonne foi des des
étudiants qui manifestent pour la pour
la Palestine aujourd’hui mais ça fait 20
ans qu’on leur colle des sous-textes
anti-juifs dont ils sont même pas
conscients on va revenir sur ces
étudiants dans un instant parce que
c’est important vous dites que les
silences qui ont entouré le 7 octobre
les silences est peut-être aussi les les
8 mai qu’on a aussi beaucoup entendu à
ce
moment-là disent que enfin si ces voix
sétaient élevées à ce moment-là vous
auriez pu entendre vous auriez peut-être
aurait été audible à vos yeux celle qui
s’élève aujourd’hui sur ce qui se passe
à Gaza non mais d’abord elles sont
audibles à à mes oreilles parce que moi
je suis révolté par ce qui se passe à
Gaza donc je je je simplement ce qui se
passe en ce moment c’est que beaucoup
d’étudiants Juifs aimeraient manifester
contre ce qui se passe à Gaza le le le
problème c’est qu’il y a des marques
cœur d’ambigué dans dans dans la lutte
qui sont pas audibles par exemple quand
on répète from the river to the sea ça
veut dire qu’on veut se débarrasser 10
millions d’Israéliens ce qui est très
drôle c’est que ce slogan from the river
to the sea a été utilisé par des
sionistes dans les années 30 qui
voulaient se débarrasser des Arabes donc
dès que quelqu’un veut avoir tout le
territoire dès que quelqu’un veut se
débarrasser de la partie adverse il
demande pas la paix il demande autre
chose et et des sous-textes comme ça il
y en a de nombreux et dans un contexte
de 1000 % d’augmentation des actes
antijuifs on n’ pas le droit d’être
ambigu quand on milite pour la paix
quand on milite pour la paix on milite
pour la paix on milite pour la survie de
tout le monde et et cette clarté là je
l’entends pas dans les discours on voit
derrière vous les images de la
manifestation sous haute tension qu’il y
a eu à scienceep à Paris en fin de
semaine dernière il y a eu aussi une
mobilisation qui a été assez rapidement
dispersée par la police ces dernières
heures à la Sorbonne toujours à Paris
certains étudiants se sont montrés les
mains levées peintes de rouge
sanglanté certains y ont vu une
référence à des meurtres de deux
israéliens commis à ramala en 2000 voilà
on voit cette photo derrière vous euh
vous dites qu’on ne peut pas on ne peut
pas excuser expliquer ce geste par par
l’ignorance que on ne peut pas penser
que ces étudiants ne savaient pas ils
ils sont d’autant moins ignorants que
les gens de l’jf les avaient prévenus
avant il s’agit pas d’une V vague image
il s’agit de la photo qui a lancé la
deuxième Intifada c’est la foule ramala
qui a tué à main nu deux jeunes
israéliens on peut utiliser les mains
rouge dans 1000 contextes pour dire vous
avez du sang sur les mains simplement
quand on l’utilise là c’est l’ambigué
est-ce que vous avez du sur les mains où
est-ce qu’on veut commettre un progromme
je suis certain de la bonne foi des
étudiants simplement sur ce sujet on les
avait prévenus et en
faisant imaginez qu’une minorité quelle
qu’elle soit disent ce symbole dans ce
contexte il est problématique tout le
monde dirait bah on utilise un autre
symbole les Juifs c’est la seule
minorité qui quand elle dit attendez
pour n’importe quel palestinien et
n’importe quel israélien cette image
c’est le lancement de la deuxième
Intifada dans ce cas-là ça veut dire
qu’on interdit aux Juifs de manifester
avec eux c’est tout et et je trouve ça
dommage parce que je pense que les
étudiants ont raison de manifester je
pense que si on est à Science Po c’est
normal d’être d’être préoccupé par ce
qui se passe au proche- Orient mais
c’est très dommage par un symbole comme
celui-là de mais mais de d’interdire aux
Juifs de manifester avec vous
l’antisionisme tel qu’il est revendiqué
aussi par une partie de ces étudiants
qui se mobilisent ici en France comme
aux États-Unis c’est là encore une
ambiguïé c’est une hypocrisie non c’est
soyons plus simple euh plus de la moitié
des Juifs du monde habitent en Israël
donc on a tous de la famille on a tous
des amis qui habitent en Israël donc que
on est en général quand on est juif
hostile à l’extermination des 100
millions de Juifs d’Israël le le
moionisme il veut pas dire grand chose
de plus que socialisme aujourd’hui c’est
des mots dont on pourrait se passer je
préfère qu’on parle du concret je
préfère qu’on parle simplement je vais
le dire autrement pour moi quiconque et
pour une solution différente qu’une
solution à deux états dans la région et
l’avocat du massacre c’est simple dès
qu’on s’imagine dès qu’on fait une carte
du Proche Orient en se débarrassant de
la Palestine ou en se débarrassant
d’Israël on est l’ennemi de la paix et
moi j’ j’entends aujourd’hui des mots
que j’ai pas entendu depuis 20 ou 30 ans
dans les deux camps j’entends des gens
par exemple j’entends des sionistes qui
pour la Palestine vont dire Sool de
Palestine comme si ça n’existait pas et
j’entends des des propalestiniens qui
disent l’antité sioniste pour dire
Israël donc si on en est à vouloir
l’élimination d’une des deux entités on
est pour la guerre la réalité aussi
impossible par on comprend que ça
paraisse impossible pendant la guerre
mais il y a pas d’autre à venir que deux
états avec des frontières reconnues je
fais partie des orphelins des accords
d’Oslo je fais partie des gens qui
croient toujours aux accords d’Abraham
et cette crise il faut aussi arrêter de
répéter aux gens que cette crise dure
depuis toujours elle dure pas depuis
toujours elle a commencé en 1900 1920 et
elle s’arrêtera un jour parce que toute
la région y a
intérêt vous parlez souvent d’une forme
de paresse intellectuelle dans les deux
camps qui expliquent aussi peut-être ses
comportements on parlait de ses de ses
références dont ce qu’il les ont faites
ont disent que ça n’a rien à voir qu’ils
étaient peut-être même pas au courant
qu’ils n’avaient jamais vu la photo non
mais cette paresse intellectuelle elle
pèse aussi beaucoup dans dans cette
impossibilité de de discussion je crois
qu’il y a deux choses il y a l’envie de
se faire entendre que je peux comprendre
qui part passe par de l’agite propre et
par des actions choc je peux tout à fait
le comprendre si c’est le préembule à
des débats or les débats aujourd’hui ils
n’ont pas lieu je répète quand quand
quand j’étais étudiant être
proalestinien ou être proisraélien
c’était se disputer autour d’une table
parce que chacun avait l’espoir de
modifier la manière dont le camp adverse
se raconta l’histoire et et moi je dois
dire que j’ai beaucoup appris grâce à
des Palestiniens et et quand je me
retrouve là-bas j’ai des amis aussi bien
musulmans que Juifs la plupart des
textes sur la Palestine des textes
importants ils ont été écrits par des
Arabes et des Juifs dans des universités
israéliennes alors quand j’entends il y
a quelques jours les étudiants de
Sciences Po vouloir boycotter les
universités israéliennes qui sont le
grand lieu du combat contre netanahou le
grand lieu du combat contre le Hamas
enfin j’ai pas remarqué que les
universités françaises a produit un seul
texte marquant sur la Palestine depuis
30 ans tous les textes marquants sur la
Palestine ils sont écrits dans des
universités israéliennes en en Israël je
connais des du contingent qui font la
guerre dès qu’ils ont de jours de libre
ils vont manifester contre netanahù donc
le vrai combat contre la guerre il est
dans la rue à Tel Aviv il est dangereux
ils prennent énormément de risque et
alors voir les étudiants français qui
disent on va vous boycotter c’est c’est
une volonté de faire terire les seules
voix qui marquent parce que
malheureusement il y a une victime de
cette guerre c’est la voix française moi
j’ai grandi dans un pays où la France
était un pays avec une diplomatie
proarabe avec un rapport privilégié à
Israël ça fait que les voix française
étent écouté aujourd’hui j’ai une
mauvaise nouvelle à vous dire c’est que
quel que soit votre camp si vous êtes en
France au Proche Orient personne sait
que vous existez et ça c’est dommage
vous dites que l’impossibilité du débat
public est lié aussi au fait qu’il y a
des injonctions posé à tous d’un côté je
ne te parle que si tu commences par me
dire que tu condamnes les actes du Hamas
de l’autre côté je ne te parle que si tu
d’abord condamnes et le gouvernement
netanahù et la guerre à Gaza mais est-ce
que ces injonctions elles permettent pas
d’une certaine façon de de de de mettre
des périmètres sur la sur la discussion
très triste je je discutais de ça avec
mes camarades palestiniens en Israël que
j’ai sollicité pour cet ouvrage
euh et à chaque fois ils veulent pas que
je mette leur nom ils veulent pas parler
pour une raison simple ils disent quoi
qu’on dise en ce moment on se le prend
dans la gueule d’un côté ou de l’autre
et et et les premiers mots c’est est-ce
que tu condamnes les attaques du ramas
du 7 octobre évidemment qu’il les
condamn les les les premiers mots dès
qu’un juif arrive quelque part en France
est-ce que tu condamne Benjamin
netaniaou tout le monde condamne
Benjamin netaniiaahou c’est un
Berlusconi israélien c’est le mec son
son son grand génie c’est jamais faire
dehors donc son métier c’est de
rester au pouvoir bon mais tout ça moi
je veux bien mais ça empêche ça empêche
la parole ça empêche la discussion et
aujourd’hui il y a beaucoup de voix qui
ne parle pas d’ailleurs je je dois dire
depuis que j’écume les plateaux je je
fréquente beaucoup de gens qui sont
identifiés à tort ou à raison pour une
cause ou pour l’autre ils se font tous
insulter H24 par tous les camps je je
vais pas publier ce que je reçois comme
insulte ou comme menace mais c’est des
deux camps et c’est n’importe quoi quand
il y a deux choses qui déclenchent des
menaces la première c’est quand je mets
des listes de livres alors je je
m’efforce de mettre des livres des deux
camp des livres éé les gens sont
scandalisés qu’on ment un livre qui leur
plaît pas mais s’il vous plaît pas ne le
lisez pas et l’autre chose c’est quand
je rappelle que le jour où il y aura
plus la guerre il faudra deux états
parce que sinon ça va être le massacre à
jamais et là je me fais insulter par
tout le monde je suis naïf je suis bonne
conscience je suis vendu ceci enfin
c’est toujours Bron signe quand on se
fait insulter par les deux camps non oui
mais ça veut dire qu’il y a il y a une
envie surtout de pas parler du réel et
ça ça cette fureur elle me fait très
peur vous disiez tout à l’heure en
évoquant la hausse sidérante des actes
antisémites ici en France que tout le
monde s’en fout euh vous
écrivez est-ce que est-ce que tout le
monde s’en fout vraiment non je je crois
qu’il y a il y a une immense majorité de
Français qui sont horrifiés par ce qui
arrive par la par le le la
radicalisation du débat par l’absence de
perspective par tout ça simplement cette
majorité silencieuse elle sait pas
comment s’exprimer euh peut-être aussi
que c’est pas le centre de leur vie et
je peux le comprendre à 8 jours des
élections européennes je je il y a
peut-être d’autres choses qui mais je
suis pas sûr que ce soit les élections
européennes qui qui captent l’attention
mais c’est c’est intéressant j’ai appris
une chose que je savais pas en librairie
les ouvrages sur le proche orient ne se
vendent qu’en France aux États-Unis ça
se vend pas même en Israël ça se vend
pas ça va en rayon universitaire on est
le seul pays au monde qui ENF j’en
bénéficie grâce à mon ouvrage mais on
est le seul pays au monde qui a une
telle passion de librairie pour le
Proche Orient et comment vous
l’expliquez ah benah la psychanalyse
française le fait qu’on est tous
polytraumatisé de de la relation au
maghrèb et de l’Algérie moi toute mon
œuvre c’est de travailler sur l’Algérie
c’est de travailler sur la mémoire
maghrébine sur tout ça donc je comprends
qu’il y a la tentation dans le proche-
Orient de rejouer des fantômes d’Algérie
mais attention au faux amis parce que
sans le faire exprès on peut faire une
espèce d’appropriation culturelle et
oublier que les Israéliens sont pas
pareil que les gens d’ici que les
Palestiniens sont pas pareils que les
maghrébains c’est d’autres populations
qui ont une autre histoire dès qu’on
leur parle moi on m’a toujours dit les
Israéliens sont israéliens avant d’être
juifs et quand je parle à mes à mes
camarades Palestiniens d’Israël je je
suis surpris de voir que leur identité
est encore très distinct d’autres pays
arabes et d’autres pays musulmans donc
le principal respect qu’on leur doit
c’est d’écouter leurs paroles moi je
regrette qu’il y a pas plus de voix
palestinienne et plus de voix
israélienne en France pour parler de la
réalité de là-bas être juif aujourd’hui
en France c’est changer son nom sur les
applications VTC retirer la mesusa sur
devant sa porte ne pas dire trop fort le
prénom de ses enfants au jardin s’ils
sont juifs vous vous demandez dans ce
livre si on est passé du difficile à
l’invivable oui on on est dans
l’invivable parce que Sartre disait
c’est l’antisémite qui fait le Juif euh
moi tous les étudiants israéliens que je
connais ont quitté la France et tous les
étudi tous les étudiants israéliens que
vous connaissez les étudiants israéliens
que je connais ont quitté la France et
les étudiants juifs que je fréquente ne
vont plus en fac où ils vont la peur au
ventre parce que nuit et jour on va les
solliciter sur le conflit et et quand on
ose dire ça et qu’on nous dit vous
pleurichez ou qu’on nous dit c’est du
chantage à l’antisémitisme c’est
vraiment dégueulasse parce que je je
crois que le point commun des Juifs
c’est qu’ils se sont toujours mobilisé
pour toutes les minorités parce que
notre histoire impose ça et et et quand
on dit que la situation est de devenu
invivable dès que quelqu’un sait que
vous êtes juif la réponse c’est pas
arrêter le chantage à l’antisémitisme
c’est c’est inexcusable et et et je
trouve que ça discrédite les les plus
nobles des causes mais après inv vivable
il y a quoi moi mon pays c’est la France
donc je vais pas partir et je vais pas
me taire et je crois que le le futur
nous appartient et il appartient à
chacun de faire de ce pays une terre
respirable il y a d’un côté la la folie
identitaire qui fait que les Français
juifs ou musulmans ou d’autres minorités
se font prendre à parti sur leur
identité en PER ça c’est un cauchemar et
l’autre cauchemar c’est la violence et
ça c’est le triste apanage de la
communauté juive qui a connu plus 1000 %
d’agression et ça c’est pas possible
aucun lien mais vous racontez que vous
avez failli vous battre vous navez
failli vous battre que trois fois depuis
le 7 octobre vous vous dites que
finalement c’est pas si mal trois fois
c’est quand même beaucoup non moi mon
étoile de David c’est ma tête donc les
les gens me reconnaissent beaucoup la
plupart des gens sont absolument
adorables j’ai fait que des rencontres
extraordinaires de depuis que je parle
deux ou trois fois c’était un peu plus
désagréable et mais c’est difficile de
haïir son prochain les yeux dans les
yeux quand on sur Internet c’est facile
quand on se voit en vrai les gens ont
beaucoup plus en commun que ce qu’ils
racontent et et et et c’est tout donc
après parfois les gens vous regardent
c’est pas vous qui voit ils voi si si le
seul Juif qu’ils ont vu c’est Benjamin
netaniaou c’est pas le meilleur
ambassadeur c’est sûr vous parlez de la
la folie identitaire et de ceux qui
attisent cette folie identitaire si vous
deviez être en colère est-ce que vous
êtes en colère déjà aujourd’hui et si
oui est-ce que vous êtes en colère
contre contre ces partis politiques
contre ceux
qui ça je suis pas en colère j’ai du
chagrin aujourd’hui il y a 300000
israéliens qui vivent loin de leur
maison il y a 2 millions de Palestiniens
qui sont déplacés c’est une situation
qui exige l’investissement et la gravité
de chacun je regrette que les débats
soient pas toujours à la hauteur de de
la situation il y a 34000 morts à Gaza
comment est-ce que vous vous vous
cohabitez dans votre vie avec ce qui se
passe à Gaza je suis écrasé je suis
écrasé de chagrin je suis je suis je
fais partie des gens qui ont qui ont
rêvé des accords de slow qui ont rêvé de
la paix je je je me sens impliqué parce
que ma famille hab làb habite là-bas
parce que c’est déchirant et et je moi
je vais dans le camp des gens qui
militent pour la paix les gens qui
militent pour autre chose sont pas mes
amis il y a quelques jours à votre place
il y avait une journaliste d’Ar que vous
avez rencontré je crois qu’ s’appelle
Laron qui a écrit un livre un livre
terrible sur le 7 octobre où elle
raconte minute par minute ce qui s’est
passé ce jour-là dans l’équip boots dans
les villages de bédouin dont vous
parliez tout à l’heure elle disait que
là-bas en Israël le deuil est é trop
grand que le la le l’horreur causée par
l’absence des otages était trop fort
pour faire de la place dans la tête des
gens à ce qui se passe à Gaza est-ce que
c’est ce que vous avez ressenti aussi
que ça écrasit ça écrasait tout c’est
c’est vrai c’est pas vrai c’est un pays
minuscule on se rend pas compte que
Israël fait 14 km de large par endroit
et à la taille de la Normandie c’est un
pays qui a pas su éponger ce carnage il
y avait pas assez de médecins légistes
il y avait pas assez de policiers il y
avait pas assez de tout ça
et le travail journalistique et le
travail d’historien va nous sauver dans
un monde de fake news dans un monde de
passion en Israël on a accès à toutes
les chaînes mais comme il y a des
soldats et des morts et des blessés dans
toutes les familles ils vont écouter que
le narratif du chagrin des soldats ils
vont pas écouter le chagrin de Gaza et
et de même à Gaza on va suivre des des
chaînes telles aljazira et on va pas
suivre d’autres chaînes il y a il y a
une volonté aujourd’hui chez tous les
les journalistes et les historiens que
je fréquente de faire du vrai
journaliste de faire du vrai travail
d’historien et et et on comprend que les
les les les populations qui sont en
situation parce que l’angoisse derrière
ça c’est la peur de la disparition de
l’identité palestinienne et la peur de
la disparition d’Israël dans les deux
cas il y a la peur légitime de
disparaître Israël est le seul État juif
au milieu de 50 États musulmans à porter
de bombes de l’Iran qui a bientôt la
bombe nucléaire on voit la situation de
Gaza la peur de disparaître c’est pas un
fantasme donc on peut comprendre les
populations qui deviennent folles et
c’est le rôle de la communauté
internationale d’apporter une autre voix
et d’apaiser malheureusement je je suis
pas sûr que les instances international
soit entendu aujourd’hui on a des
Nations Unies qui sont en bout de course
on a une politique extérieure chez les
grandes puissances qui est qui est
amoindrie depuis Obama et Trump aux
États-Unis et dans d’autres pays la
France n’est plus entendue alors que
c’était un un médiateur important donc
oui c’est catastrophique pour rester
avec nous Joan on fait une pause de 3
minutes et on se retrouve juste après
pour la suite de cette discussion
merci 10h30 ici à Paris la suite de
parlons-en avec le grand invité
aujourd’hui Johann soir bonjour bonjour
dessinateur et vous signez nous on
enquête sur l’avenir des Juifs qui vient
de sortir aux arènes ne vous précipitez
pas en librairie car on le disait tout à
l’heure pour l’instant le livre est en
réimpression car il a beaucoup de succès
on évoquait avant de se quitter les
témoignages qui font partie de la
deuxième partie du livre que vous avez
récolté au mois de décembre je crois en
Israël vous dites qu’en Israël tout le
monde déteste benjamine netanahou mais
pas pour les mêmes raisons non tout le
monde le déteste c’est un peu trop mais
oui mais mais pas pour les mêmes raisons
il y a il y a des gens qui manifestent
contre la guerre il y a les familles
d’otage qui manifestent parce qu’il lui
reprochent de pas avoir le lever le
doigt pour les otages il y a des gens
d’extrême droite qui le reprochent de
pas en faire assez le le génie de
netaniaou c’est de se maintenir au
pouvoir dans un pays de proportionnel
intégral donc il est un peu j’allais
dire autage c’est une expression
malvenue de 3 ou 4 % de députés
d’extrême extrême droite et ce qui est
certain c’est que c’est un pays qui
tente de maintenir son unité parce qu’il
y a la guerre mais qui est déchiré par
des des conflits internes sanglants
Benjamin ou faut-il le rappeler qui
était depuis des mois avant le 7 octobre
la cible de
manifestation extraordinairement
nombreus contre une réforme de la de la
de la justice qu’il portait le Premier
ministre israélien est-ce qu’il est
juste de dire aujourd’hui qu’il ne tient
son maintien au pouvoir qu’à la guerre
est-ce que c’est l’expression du cynisme
politique porté à son j’ai pas les
compétences pour en parler mais on peut
le comprendre comme ça vous êtes très
actif Joan Spar sur les réseaux sociaux
depuis alors pas depuis le 7 octobre
vous l’étiez déjà avant mais
particulièrement depuis le 7 octobre où
vous publiez certains pardon le micro
certains des dessins qu’on retrouve tous
les dessins d’ailleurs qu’on retrouve
dans le livre avec parfois peut-être le
piège de l’immédiaté dans la guerre on
parlait tout à l’heure des narratifs
c’est vrai que c’est parfois compliqué
quand un événement intervient
de d’en faire quelque chose tout de
suite c’est ça que je voulais dire
chaque personne qui traite ce sujet on
on l’a évoqué tout à l’heure et c’est le
cas aussi pour les journalistes que nous
sommes c’est à quoi qu’elle c’est à quoi
elle s’expose et c’est souvent des
tombreau d’insulte des deux camps euh ça
vaut la peine oui c’est c’est deux
choses différentses les dessins que je
publie sur internet c’est un flu donc je
publie ce qui me passe par la tête d’une
certaine façon le livre il est réécrit
il est relu j’ai retiré 50 pages il y a
eu des des journalistes et des
historiens qui m’ont aidé à l’aboutir
donc c’est pas exactement le même
langage est-ce qu’il y a des choses que
vous avez faites au cours voilà depuis
le 7 octobre dans l’immédiaté que vous
voilà qui qui qui qui qui ne sont pas
dans le livre aujourd’hui oui on a
retiré beaucoup de choses sur les
explications historiques ou
géopolitiques du Proche Orient parce que
c’était pas ce livre-là j’ai retiré des
choses qui me paraissaient trop
spécifiquement françaises parce que
c’est un livre qui va s’adresser à
plusieurs pays euh et après j’ai j’ai
j’ai retirai des choses qui étaient sur
d’autres sujets où c’était mais c’est
c’est plus l’idée de la cohérence de
l’ouvrage qui me tient à cœur ensuite
les dessins que je publie au jour le
jour tout le monde sait très bien ce que
c’est c’est comme de la presse c’est euh
ce qui s’est passé aujourd’hui vous
dites que vous êtes donc que vous
récoltez beaucoup d’insultes des deux
conamp alors au début c’était plutôt
côté palestinien mais alors plus ça va
et plus vous dites que vous faites aussi
insultter par des Juifs c’est non c’est
tout le monde c’est c’est c’est tout le
monde j’allais dire la la principale
différence c’est que les Juifs ne me
menacent pas et je vois là effectivement
l’impuissance d’une population qui est
qui est déchirée par le Proche Orient
qui a envie de participer qui a envie de
parler mais moi je suis le représentant
de personne je je suis pas donc j’ai
jamais voulu l’être je suis
représentatif parce que je suis entre
d’une famille de juifs maghrébains de
Juifs Ukrainiens ma famille est
israélienne je suis profondément
français donc je suis peut-être
représentatif de quelque chose ce que
j’ai voulu faire c’est donner une voix
au chagrin des Juifs après le 7 octobre
et aux Israéliens que je fréquente juif
et musulmans bon mais après forcémenti
si je commence à m’autocensurer je fais
plus rien donc je préfère travailler
avec ma petite voix elle plaît elle
plaît pas après j’ai pas de service
aprèsvente sur ce que les gens aiment
pas ils ont qu’ pas l’acheter que que
peut que peut un artiste face à la
guerre face à l’antisémitisme face à ce
conflit et vous dites rien alors rien et
c’est une très bonne nouvelle ça permet
d’écrire sans s’autocensurer mais tout
de même sans les journalistes et sans
les historiens dans un monde de fake
news on est foutu donc moi mon boulot
c’est de faire des sciences humaines en
bande dessiné c’est de faire teinter un
reporter c’est d’apporter des
témoignages qui sont pas des interviews
parce que je pose pas de questions je
m’assie des gens je les dessine je les
laisse parler j’enregistre pas je note
SAF qu’ils ont beaucoup de choses à dire
mais ils ont plein de choses à dire la
première phrase de tous mes
interlocuteurs c’est tu vas pas avoir le
temps de m’écouter bah vas-y j’ai 450
pages et là on a des choses qu’on entend
nulle part ailleurs parce qu’ils ont le
temps c’est un livre je vous le disais
tout à l’heure pendant la pause au cours
qui qui qui raconte des choses terribles
mais il y a des pages où on rit est-ce
qu’on est-ce qu’on a le droit de rire
j’espère ben j’espère parce que comme il
y a beaucoup de Juifs parmi les gens qui
parlent en général ils ont une certaine
dose d’humour et surtout part temp
tragique et par exemple hi Cohen grand
comédien qu’on a vu dans dans faoua qui
me dit après le 7 octobre j’ai été
coincé à Londres avec mon ex-femme pour
faire des conférences pendant 15 jours
je ne pardonnerai jamais au Hamas on ri
et puis il y a des il y a des pages
effectivement avec des avec des dessins
terribles avec des mots terribles
notamment sur sur la journée du 7 et
vous dites que le dessin euh n’est pas
du tout là pour adoucir l’horreur c’est
pas le propos c’est pas le sujet non
c’est l’inverse c’est regardez quand le
ramas a filmé ses massacres
immédiatement il y a eu des
négationnistes qui ont dit c’est pas
vrai tandis que quand il y a un travail
de journaliste quand il y a un travail
de dessin qui est déjà une manière
d’intellectualiser la photo tout de
suite on entre dans un processus qui est
pas plus apaisé mais qui devient
historique et et le dessin m’aide à
rendre intelligible des chose que qu’une
photo éloignerait de moi ça vous a fait
du bien de dessiner et d’écrire mais oui
moi moi même quand je travaille sur des
choses abominable le dessin m’aide à la
fois à comprendre à mettre à distance à
dire mes doutes c’est un outil de de
représentation qui permet de s’emparer
du réel même quand il est insoutenable
vous disiez tout à l’heure vous êtes
moitié spharade moitié kenas
profondément français votre famille est
israélienne vous dites de vous que vous
êtes un pessimiste joyeux c’était vrai
avant le 7 octobre est-ce que c’est
toujours vrai aujourd’hui oui c’est
toujours le cas il y a une chanson de
brassin que j’aime beaucoup honte à qui
peut chanter pendant que R brûle et il
répond elle brûle tout le temps donc non
il faut pas cesser de se parler il faut
pas cesser de dessiner il faut pas
cesser de discourir parce que Sin non si
si on n pas d’espoir on se couche on
pleure faut dit de ce livre qu’il est
d’une certaine façon le le la
manifestation
d’un échec de ce à quoi vous croyez
quand même depuis 30 ans oui oui moi je
suis profondément français ça fait 30
ans que je que je m’investis dans le
dialogue entre les communautés tout mon
travail c’est des juifs qui ont l’air
arabe et c’est des maghrébains qui
réenchantent leurs souvenirs et et quand
je vois la déchirure qu’il y a
aujourd’hui qui est causé peut-être par
une chose c’est que comme on a grandi
proche les uns des autres on s’imagine
qu’on se connaît mais en vrai on se
connaît pas tant que ça et et cette
cette petite distance qui crée beaucoup
de haine j’essaie de lutter contre et
c’est vrai que je fais partie des petits
acteurs du dialogue intercommunautaire
en France donc je je je prends chaque
catastrophe comme un échec
personnel ça va pas ça va pas si bien
alors
euh vous êtes orphelin des accords
d’Oslo vous le disiez et maintenant
qu’est-ce qu’on fait maintenant bah
maintenant il y a il y a il y a tout de
même certaines bonnes nouvelles on a on
voit bien que ces accords d’Abraham qui
ont été beaucoup décriés ils ont pas
sauté après le 7 octobre on voit bien
que l’immense majorité des voisins
d’Israël aspire à une région pacifiée y
compris d’anciens ennemis à l’exception
de l’Iran et j’allais dire de la Russie
je vois pas beaucoup de monde qui ont
intérêt à cette guerre vous imaginez
demain dans 6 mois dans 10 ans après
tout ce que les communautés ont
vécu la paix bien sûr enfin en France en
tout cas oui moi j’ai j’ai moi en France
on est un pays en paix et mais
évidemment mais évidemment enfin c’est
l’intérêt de tout le monde Je je je je
crois qu’il c’est une région que que
tout le monde tente de déstabiliser
parce qu’il y a pas que des amis de la
paix là-bas mais les populations rêvent
que de ça ensuite sous quelle for forme
ça ça c’est un autre débat votre
judaïsme Johan soir vous l’explorez
depuis des dizaines d’années dans votre
travail notamment dans le chat du Rabin
qu’est-ce que le le 7 octobre a fait à
votre
judaïsme ça j’en sais rien on s’est mis
à M invité dans dans pas mal
d’institutions juifes donc j’ai
découvert que chaque Juif en France est
président d’un truc ça m’a permis de
vous vous êtes président de quoi moi je
suis président de pas grand chose ça m’a
permis de reconnecter avec des des
associations que je trouve très
courageuses je pense au au aux étudiants
juifs de l’jf qui qui ont qui essaent
d’avoir une parole apaisée et qui en
prennent beaucoup dans la figure je
pense aux guerrièr de la paix qui font
un travail extraordinaire je pense à
l’association nous vivrons qui essayent
de de dialoguer je je pense qu’il y a
beaucoup de bonne volonté il y a
beaucoup de gens qui veulent pas se
résoudre au au blocage du du dialogue et
voilà alors parfois c’est maladroit
parfois c’est tout ce qu’on veut mais il
y a il y a une volonté que ça se passe
mieux vous le disiez tout à l’heure vous
préférez je crois c’est ce que vous
disiez un individu à un groupe que c’est
plus facile de parler avec un individu
qu’avec un groupe avec ses convictions
de groupe aussi ses certitudes est-ce
que c’est pas trop tard pour ça ici en
France est-ce que le groupe n’a pas
écrasé tout le reste bah j’espère que
non parce que si les gens se définissent
uniquement par leur identité on va nulle
part moi je moi je les questionne les
identités si je parle tout le temps de
judaïsme c’est parce que je sais pas
exactement ce que c’est j’aimerais bien
que le judaïsme ce soit avant tout une
voix culturelle je je suis embêté j’ai
remarqué quand quand les gens aiment pas
les juifs ils sont en général
juifologues c’est ils sont spécialistes
des Juifs et ils se mettent à m’écrire
pour m’expliquer ma biologie mon ethnie
machin ils en savent plus que moi et ça
ça me préoccupe un petit peu cette
manière d’enfermer les gens dans du dans
du prépensé ça me me préoccupe un petit
peu je suis dans l’
féisme c’est ça ça pour ça revient à ce
dont on parlait tout à l’heure sur la
l’absence de complexité du propos on a
du mal ici en France à accepter la
complexité des identités ce qui fait un
individu c’est toute sa toute sa
richesse toutes ses oui quand quand on
dit que les gens sont pas informés c’est
pas tout à fait vrai les gens sont
surinformés au narratif de leur camp
donc quand on va les brancher sur le
sujet qui soit pour la Palestine ou pour
Israël ils vont répéter par cœur des
dizaines de trucs qui répètent depuis 30
ans et là on va nulle part et il faut
trouver il y a un livre que j’aime
beaucoup qui s’appelle l’histoire de
l’autre qui compile dans le même ouvrage
le récit vu par des Palestiniens et vu
par des Israéliens du Proche Orient et
comme disait mon père une tragédie c’est
quand tout le monde a raison et les
Palestiniens ont raison de rappeler les
massacres qu’ils ont subis en 48 et les
Juifs ont raison de rappeler qu’entre
1920 et 1960 ils ont été 1 million à se
faire massacrer et fout dehors du monde
arabe et et écouter le chagrin et
l’histoire de chacun ça namoindrit pas
l’engagement politique au
contraire votre travail fait l’objet
d’une exposition en ce moment ici à
Paris au musée d’art et d’histoire du
judaïsme qui s’appelle la vie dessinée
il les questions en partie des des
livres qu’on voit derrière vous et et
des séries vous dites que cette
exposition est protégé comme un
porte-avion on en est quand même là ça
c’est tout de même triste parce que
c’est c’est une institution laïque et
républicaine c’est pour faire mettre une
voix juive dans la dans la polyphonie
comme disait le buunt et et même là il
faut des policiers partout donc on voit
bien que c’est la parole juive qui
aujourd’hui est considérée comme
clivante ou comme problématique alors
que il me semble qu’en général ce sont
tout de même des paroles de paix qu’on
essaie d’amener oui on va pas s’arrêter
là-dessus on va rester sur des paroles
de paix quand même j’espère merci
infiniment merci beaucoup Joann s d’être
venu ce matin sur ce plateau nous
vivront enquête sur l’avenir des Juifs
ça pèse très lourd il est là c’est aux
arènes il est en réimpression bien sûr
on peut rappeler vos autres ouvrages les
séries à succès chat du Rabin petit
vampire on peut vous retrouver et en
dépit de ce que ça vous coûte
visiblement en terme de de de retour
plus ou moins agréable sur sur les
réseaux sociaux notamment sur Instagram
merci infinimentci d’être venu ce matin
sur le plateau de parlons-en et d’avoir
été notre grand témoin tout au

Le dessinateur français Joann Sfar signe “Nous vivrons : enquête sur l’avenir des juifs” (Ed. Arènes), un livre polyphonique écrit dans l’urgence, après le massacre du Hamas en Israël, le 7 octobre 2023. Un roman graphique qui mêle l’insoutenable, l’humour et l’absurde.

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