« On a eu juste le temps de béquiller qu’on s’est fait attaquer de toute part »

L’assaut a été immédiat. « On a eu à peine le temps de béquiller qu’on s’est fait attaquer de toute part », témoignent trois motards. L’un avait encore son casque quand il a reçu le premier coup. Le 18 septembre 2021, à l’American Saloon de Tarbes, une rixe entre bikers a opposé des membres des Rebels, venus en voisins, et des Hells Angels agissant avec des motards de clubs amis. Bilan : un mort, tué de cinq coups de couteau, et six blessés par des coups de poing, de pied ou de couteau. Le porteur de l’arme blanche sera jugé en juin devant la cour d’assises de la Gironde.

Dix prévenus, Hells Angels ou sympathisants voire candidats pour devenir membres à part entière, sont jugés depuis ce lundi 21 octobre devant le tribunal correctionnel de Bordeaux pour leur plus ou moins grande participation à la bagarre et à l’association de malfaiteurs qui se serait constituée pour la préparer. Deux autres, des Rebels venus au secours de leurs amis, sont aussi sur le banc des prévenus.

Le silence est un droit en procédure pénale, c’est un devoir érigé en loi dans le code d’honneur des Hells Angels

Pas de moto rutilante et vrombissante devant le palais de justice. Les prévenus aux gabarits imposants ont troqué le blouson siglé contre un jean et une veste plus sobres, qui ne cachent pas tous les tatouages. Le silence est un droit en procédure pénale, c’est un devoir érigé en loi dans le code d’honneur des Hells Angels.

Correction collective

Mais, au fil des auditions et confrontés aux déclarations de témoins, aux films amateurs et images de vidéosurveillance, ils n’ont pu nier, a minima, l’évidence de leur présence. La présidente, Catherine Bonnici, les interroge dans leur ordre d’apparition sur la scène de crime.

Du donneur de « go » aux donneurs de coups, tous démentent avoir organisé une correction collective planifiée sur fond de lutte et de marquage de territoire. « Un club autre se crée, soit. Ils font leur vie et vous la vôtre, en quoi ça devient un sujet ? » s’étonne la présidente. « Le principe veut qu’il n’y en ait pas deux sur le même secteur », bafouille un prévenu.

« Si on est là, ils n’ont pas à être là », résume un autre, candidat à l’intégration aux Hells Angels, qui passe aussi par des faits d’armes. Les prévenus édulcorent, ne donnent aucune explication à leur geste, se défendent de toute préparation. Le rassemblement de leurs véhicules sur un parking de centre commercial avant l’American Saloon ? Pour acheter un bas de jogging à l’un. Une réunion la veille des faits dans un local de Serres-Castet, dont il ressort qu’il faut mettre les points sur les « i » des Rebels ? « Une façon de parler. »

« On avait prévu un moment tranquille à Tarbes, rien n’était écrit sur le déroulement de la journée », répète un prévenu. La présence des Rebels était « une supposition ». « On voulait une bonne discussion », explique un autre, inversant les responsabilités de l’échauffourée. « On avait un bon état d’esprit », jure encore un autre, qui admet être allé au contact avant un grand « bim, bam, boum ». « Ce n’était pas pour en découdre. C’est des motards comme nous, ils roulent en groupe. Je dis bonjour et le gars fait un geste avec son casque. » « Un excès de cordialité », ironise le vice-procureur, Bertrand Rouède, qui doit prendre ses réquisitions ce mardi.

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