Pluviométrie extrême –
La Suisse connaît un automne exceptionnellement pluvieux
Les précipitations ont dépassé les normales depuis septembre. Les agriculteurs souffrent de sols saturés en eau, nuisant à leur culture.
Le niveau des eaux souterraines est étroitement lié aux quantités de précipitations tombées les mois précédents.
KEYSTONE
«Il faut remonter jusqu’à 1998 pour avoir des valeurs de précipitations proches de ce que l’on vit en ce début d’automne», alerte Lionel Fontannaz, de MétéoSuisse. En effet, depuis le premier septembre, la période a été particulièrement pluvieuse. «On compte un excédent pluviométrique de 30 à 35% par rapport à la norme», détaille le météorologue.
En Suisse, le niveau des eaux souterraines est étroitement lié aux quantités de précipitations tombées les mois précédents. Dès lors, cet automne pluvieux peut avoir des conséquences sur les nappes phréatiques et les sols. «On a pas mal de paysans qui nous appellent, remarque Lionel Fontannaz. Les sols sont chargés d’humidité et les agriculteurs ne peuvent pas aller sur leurs terres avec leurs tracteurs, sous peine de tasser le sol de manière irréversible.»
«Une année très arrosée»
Pour MétéoSuisse, 2024 tout entière est une année qui détonne en termes de précipitations. «Depuis 1999, on est en dessous de la norme pluviométrique, à quelques exceptions près.» Lionel Fontannaz constate que, de 2015 à 2021, «il y a eu un déficit de pluie de 20 à 60% par rapport à la norme». Au regard des vingt-cinq dernières années, «2024 apparaît donc comme très arrosée», résume-t-il. Mais le spécialiste reste prudent sur ses prédictions. «C’est un peu délicat de faire une projection pour le reste de la saison, même s’il y a quand même des tendances mensuelles.»
Chaque mois, l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) fait le point sur l’état des eaux souterraines du pays. Et le dernier bulletin datant du 9 octobre confirme la tendance à la hausse. «En raison des précipitations abondantes des dernières semaines, les aquifères sont bien remplis d’eau, ce qui veut dire que les niveaux d’eau souterraine et les débits de source se situent actuellement dans la normale ou sont supérieurs à celle-ci», développe Rebekka Reichlin, chargée de communication de l’OFEV.
En effet, «si le mois d’août a été marqué dans tout le pays par des températures estivales, un temps sec et des précipitations nettement inférieures à la moyenne, les précipitations survenues en septembre dépassent, elles, la moyenne établie pour ce mois», souligne l’OFEV.
Risques de débordement
Si les nappes phréatiques ne cessent de se remplir, ne risquent-elles pas de déborder? L’OFEV précise d’abord qu’en cas de fortes précipitations, l’eau ne s’infiltre que partiellement dans les eaux souterraines. «La plus grande partie des précipitations ruisselle dans les eaux de surface et en augmente le débit.»
Les eaux souterraines restent toutefois à risque, selon l’Office fédéral de l’environnement. «Le potentiel de dommages et la vulnérabilité des aquifères peu profonds sont particulièrement évidents en cas de crues ou de précipitations intenses.» Par exemple, «l’infiltration accrue des eaux de surface et l’inondation des zones de recharge peuvent entraîner une augmentation des bactéries fécales et d’autres polluants dans les aquifères et ainsi contaminer les captages d’eaux souterraines».
Tassement des terrains agricoles
Le milieu de l’agriculture confirme également les craintes des météorologues quant à l’état des champs gorgés d’eau. «La résistance du sol, c’est-à-dire sa capacité de charge, diminue avec l’augmentation de l’humidité, explique Thomas Keller, chercheur à l’Agroscope. Et lorsqu’il est compacté, le terrain perd sa porosité. Les propriétés telles que l’infiltration de l’eau et le drainage se détériorent, l’aération du sol devient moins bonne, et la résistance mécanique dans le sol devient plus élevée, ce qui entraîne une moins bonne croissance des racines et donc une diminution de la production végétale», énumère l’Agroscope.
Les données issues d’un essai de longue durée effectué par l’Agroscope révèlent que lorsque le sol est compacté, à partir d’une profondeur de 25 cm, la régénération du terrain peut prendre des décennies. Et ces risques sont difficiles à anticiper, ajoute Alice Johannes, également chercheuse à l’Agroscope. «Les agriculteurs ne sont souvent pas en mesure de déterminer leur propre calendrier de récolte et ne peuvent donc pas toujours prendre en compte la météo à court terme. Les dates sont parfois déterminées bien à l’avance parce qu’il faut, par exemple, réserver une machine.» Pour pallier ce problème, l’Agroscope a participé au développement de Terranimo, un outil d’aide permettant de simuler les risques de tassements du sol.
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