La méfiance s’est glissée insidieusement à tous les étages des groupes de travail, et les relations interpersonnelles entre présidents de partis sont loin d’être au beau fixe. Les incessantes fuites dans la presse de nombreuses notes de travail, qui mettent en lumière les gros points de désaccord entre les cinq partis n’aident pas. Pourtant, le temps presse. Bart De Wever répète à l’envi qu’un accord, notamment sur le budget, doit être scellé pour la fin novembre, afin d’être avalisé sans tarder par le Parlement. La proposition de budget 2025 doit en effet être envoyée pour décembre à la Commission, qui a octroyé un rabais de deux mois à la Belgique. On est loin, très loin de ce scénario idéal. Pas seulement parce qu’il reste de très nombreux différends de fond entre les partis. On sait que l’un des enjeux doit être de réduire les dépenses primaires – le critère principal qui sera examiné par la Commission – de quelque 16 milliards d’euros. Et probablement plus vu la légère dégradation attendue de la croissance économique belge et la nécessité de dégager un peu de marges pour des politiques de soutien ici et là. Quoi qu’il en soit, déficit public (5 à 5,5 % du PIB de 2025 à 2029) et endettement public (120 % du PIB attendus en 2029) sont tels en Belgique, que notre pays est amené à être l’un des derniers élèves de la classe européenne, à politique inchangée.
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L’exercice de conception du budget est particulièrement ardu. Les cases des premiers tableaux budgétaires en confection dans l’entourage du président de la N-VA ne sont d’ailleurs pas complètement remplies. C’est que les premières ébauches contenaient des effets retour des politiques nouvelles (sur l’emploi par exemple) très importants (près de 14 milliards d’euros), qui ne pourront pas, pour la très grosse majorité, être repris par l’Arizona. Les calculettes vont chauffer. Les esprits aussi, d’autant que l’étau se resserre au niveau des taux d’intérêt. La méfiance grandissante sur les marchés financiers à l’égard de la dette belge se reflète en partie dans les taux d’intérêt à long terme (10 ans). Il n’y a pour l’instant pas péril en la demeure, d’autant que l’essentiel de la dette belge est entre les mains de ses résidents, mais tout de même : en quelques semaines, le taux à 10 ans (de l’obligation linéaire belge – OLO) est passé de 2,5 à 2,9 %.
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Ce vendredi, un nouveau coup de chaud n’est pas à exclure. Après Moody’s la semaine, l’agence de notations Standard & Poor’s donnera son avis sur la note belge ce jour-là, et la capacité de la Belgique à soutenir sa dette (107 % du PIB attendus pour 2024), probablement en fin de journée. Pour Eric Dor, professeur d’économie à l’Ieseg (Lille), la dégradation de la note belge est plausible. “Les écarts de notes octroyées par l’agence entre la Belgique et beaucoup de pays moins bien notés sont maintenant très difficiles à justifier. Les performances de déficit, dette et croissance réelle de la Belgique, réalisées en 2023 et projetées pour 2024 et 2025, sont inférieures à ce que montrent la plupart des autres pays européens ayant la même note ou une note inférieure, à part surtout la France et l’Italie”, explique-t-il. Avec quelles conséquences ? Impossible à dire, d’autant que les marchés financiers ont tendance à anticiper les nouvelles attendues, bonnes ou mauvaises. Ce qui est certain, c’est que le non-respect du timing d’un accord budgétaire avant décembre serait une vraie tuile pour la Belgique.